L’attribution gratuite d’actions : un instrument de fidélisation et de motivation des salariés

Il n’est pas rare que certains dirigeants souhaitent récompenser leurs salariés en leur attribuant des actions à titre gratuit.

En effet, c’est un mécanisme de rémunération complémentaire qui vise à motiver et à fidéliser certains salariés.

Par le biais de l’attribution d’actions gratuites, des salariés peuvent ainsi se voir récompenser de leur participation au développement de la société.

Les salariés peuvent ainsi se constituer un portefeuille de valeurs mobilières.

Toutefois, un accompagnement est nécessaire afin de maîtriser l’entrée de ces nouveaux associés et protéger les associés fondateurs en leur permettant de conserver une majorité pour les décisions stratégiques.

L’avantage d’un tel instrument

L’attribution gratuite d’actions n’entraîne aucune prise de risque financier pour les bénéficiaires, qui n’ont aucun versement à effectuer, et permet de leur garantir la réalisation d’un gain lors de l’éventuelle revente de leurs actions.

Le champ d’application
de cet avantage

L’ensemble des sociétés par actions peuvent mettre en place un plan d’attribution gratuite d’actions au bénéfice de leurs salariés (L 225-197-1 du Code de commerce) : il s’agira des sociétés anonymes, des sociétés par actions simplifiées, ou encore des Sociétés en commandite par actions. 

Attention, la mise en place
d’un tel procédé nécessite
de respecter une procédure particulière

  • Une première phase relative à la réunion d’une assemblée extraordinaire des associés qui doit décider :
      • du principe de l’attribution gratuite d’actions ;
      • d’attribuer gratuitement un certain nombre d’actions à tout ou partie de ses salariés en respectant les plafonds légaux imposés par la loi (voir ci-après);
      • de fixer une durée minimale de période d’acquisition par les salariés (i.e. la période pendant laquelle les bénéficiaires peuvent, s’ils le souhaitent, acquérir les actions gratuites) ;
      • de fixer une période de conservation des titres par les salariés (i.e. la période pendant laquelle les bénéficiaires ne pourront pas revendre les actions accordées gratuitement).

Cette autorisation peut être utilisée par le dirigeant pendant un délai qui doit être fixé par l’assemblée et qui ne peut être supérieur à 38 mois.

  • Une deuxième phase aux termes de laquelle le dirigeant est compétent, dans les limites fixées par l’assemblée initiale, pour déterminer :
      • l’identité des bénéficiaires des attributions, soit parmi l’ensemble du personnel salarié, soit dans la ou les catégories qui auront été définies par l’assemblée initiale ;
      • les critères d’attribution (durée définie pour l’acquisition et la conservation des titres à compter de l’acquisition des titres par ces derniers).

Il convient de préciser que le dirigeant peut ajouter des conditions supplémentaires: À titre d’exemple, l’obligation pour les attributaires d’être encore salariés au moment de l’attribution définitive des actions (lors de l’expiration de la période d’acquisition), des conditions de performance individuelles des bénéficiaires, d’ancienneté ou encore de performance financière de la société dont les actions sont attribuées.

  • Une troisième phase constituée par la signature d’un règlement du plan d’attribution par les membres du personnel et la société.
  • Une quatrième phase relative à la durée d’acquisition des actions gratuites par le salarié : Cette durée d’acquisition ne peut pas être inférieure à un an, mais il est possible de prévoir une période d’acquisition plus longue. Au cours de cette période, le salarié pourra acquérir les titres.
  • Une cinquième phase relative à l’acquisition définitive des actions par les salariés bénéficiaires : cette phase intervient à l’expiration de la période d’acquisition, dès lors que les conditions et critères fixés par la décision d’attribution sont remplis.
      • La société doit transférer le nombre d’actions convenu à l’origine.
      • La société effectuera une augmentation de capital à hauteur des nouvelles actions créées.
      • À compter de cette date, le salarié devient associé de la société et il peut exercer ses droits politiques et financiers.
  • Une sixième phase de conservation des titres par les salariés bénéficiaires nouvellement associés : Les salariés bénéficiaires des titres devront, en effet, respecter une période de conservation d’ores et déjà fixée par la première assemblée générale des actionnaires.

À cet égard, la vente, la donation de la propriété des actions gratuites, ou encore la location desdites actions, constituent une violation de cette obligation de conservation.

Néanmoins, nous vous précisons que depuis le 8 août 2015, il n’est plus obligatoire de prévoir une période de conservation.

Toutefois, nous vous conseillons de prévoir une telle période, afin de s’assurer que l’actionnariat soit figé pendant une durée minimale.

  • La mise en place d’un actionnariat salarié aura nécessairement pour conséquence la dilution du pourcentage de participation des associés fondateurs.

Toutefois, cette dilution est limitée par le plafond global instauré par la loi, concernant l’attribution gratuite d’actions.

À ce propos, afin de favoriser l’actionnariat salarié, la loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 a assouplit les conditions d’attribution gratuite d’actions en relevant les plafonds d’attribution, et a en conséquence modifié les articles L 225-197-1 et L 225-197-2 du code de commerce.

Concernant le plafond global :

  • Le plafond général global du nombre total d’actions gratuites, profitant uniquement à certaines catégories de personnel, est porté à 15 % du capital social alors qu’auparavant, il était fixé à 10 %.
  • Pour les PME (effectif inférieur à 250 salariés et total de bilan inférieur à 43 millions d’euros ou montant CA HT inférieur à 50 millions d’euros) et dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, le plafond est relevé à 20 % du capital social.
  • Néanmoins, lorsque les actions gratuites bénéficient à l’ensemble des salariés de la société (AGA « démocratiques »), la loi 2023-1107 augmente ce plafond à 40 % du capital social (art. L 225-197-1, I-al. 3 modifié) au lieu de 30%, sous réserve du respect de certaines conditions.

Concernant le plafond individuel :

  • Il est important de surligner qu’aucune action gratuite ne peut être attribuée à un salarié détenant déjà plus de 10 % du capital.
  • Toutefois, la loi sur le partage de la valeur assouplit les modalités de calcul de ce plafond individuel. Il résulte de cette modification que le salarié ayant atteint le plafond individuel pourra de nouveau bénéficier d’une attribution gratuite d’actions au bout de 7 années.

Par ailleurs, la rédaction d’un pacte d’actionnaires conclu entre les associés fondateurs et les nouveaux membres du personnel salarié permettra de garantir la stabilité de l’actionnariat de la société (clause de non-dilution, clause de limitation des participations, clause encadrant la sortie des associés salariés, clause de confidentialité, clause de non-concurrence).

Enfin, la mise en place d’actions nouvelles comportant des droits différents (actions de préférence), de ceux des autres actions (actions ordinaires) dont notamment la suspension du droit de vote pour une durée déterminée ou déterminable, sera un outil supplémentaire pour permettre une entrée en toute sécurité de l’actionnariat salarié.



Ce dispositif est également ouvert aux dirigeants non associés, ces derniers pouvant être récompensés par l’octroi d’actions gratuites.

Si vous êtes intéressé par la mise en place d’un salariat actionnaire, n’hésitez pas à solliciter l’expertise et l’accompagnement du Cabinet LEGALPROTECH-AVOCATS.

par Anouk Thomar